Le verre ne casse pas. Lancé avec force pourtant sur le mur en béton, il se contente de vaciller et atterrit intact sur le tapis moelleux du salon. Pas de bris. Pas de son. Juste un petit bang qui ne suffit pas à calmer ma colère. Pire encore. Tu souris. Immédiatement je regrette d’avoir choisi le mur. Impassible, le rictus à peine voilé tu continues à te taire. Tu me défies.
Je choisis mes mots, cassants, coupants. Des mots qui me brûlent, des mots qui font mal. Ceux qu’on ne dit jamais par peur. Ceux qu’on ne voudrait jamais avoir à dire. Tu te contentes de ramasser le verre et le pose délicatement sur la table basse. Tu ne m’entends pas. Ce n’est pas la première fois que les objets volent, que les portes claquent. Tu en as pris l’habitude. Je ne suis plus rien pour toi. Je n’existe plus. Tu passes à côté de moi sans un regard. Tu ouvres le frigo et commence à préparer le repas. Je n’ai pas faim. Je me sens vidée.
La colère se dissipe peu à peu et fait place à la tristesse. Profonde. Intense. Je pleure en silence. Tout est fini. Je monte dans la chambre je suis si fatiguée mais le repos ne vient pas. Je devrais partir je le sais mais ne peux m’y résoudre. J’entends la porte qui s’ouvre, c’est elle. Tu l’invites tous les soirs à présent. Tu es amoureux. Ça ne durera pas. Ça ne dure jamais. Je lui ai crié de partir, j’ai hurlé même mais elle est toujours là et mes forces s’amenuisent. J’ai de la peine pour elle. Elle ne te connait pas et ne sait pas encore de quoi tu es capable.
La lumière du patio s’allume, tu l’enlaces et l’entraines sous la tonnelle. C’était mon endroit préféré. Quelle ironie ! Tu m’y as enterrée. Je vous regarde danser, boire et rire et juste en dessous mon corps se putréfie. Je ne suis plus qu’une âme errante avide d’une vengeance que je n’aurai jamais.
Véronique Lanonne @2019
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