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  • Photo du rédacteurVéronique Lanonne

LA DEMANDE

Je savais qu’il avait choisi ce 14 Février pour faire sa demande. Ne me demandez pas comment je le savais, toutes les femmes ici comprendront. Les hommes et les secrets ne font pas bon ménage. Il avait un sourire étrange depuis quelques jours et me posait des questions orientées pour préparer son méfait. J’étais donc au comble du bonheur. J’avais acheté une jolie robe pour l’occasion, rouge évidemment et des dessous assortis, pour l’après. J’étais encore mariée. Mais ça c’est un détail. Mon ex convolait déjà dans le péché et nous étions prêts à signer.


Le 9 Février, j’avais déjà tout prévu. J’avais appelé toutes mes copines, pris rendez-vous chez le coiffeur et préparer mon « oui, je le veux », quand le malheur frappa. Une pomme trop dure et une dent en moins. La douleur fut telle que je me rendis d’urgence chez mon dentiste. Constat sans appel, il fallait ôter la racine, chose qu’il fit sans difficulté. Mais, évidemment, tout alla de travers. Infection, abcès. J’étais donc sous morphine ce fameux soir. À forte dose. J’avais des joues de hamster mais une belle robe rouge.


Rien ne viendrait gâcher mon plaisir. Je faisais donc bonne figure lorsqu’il gara la voiture dans un des plus beau restaurant de la côte d’azur, niché dans un village perché. Il remit les clés au voiturier et nous gravîmes les vieilles marches en pierre. Rester digne, campée sur des talons en escaladant des ruines n’est pas chose aisée, mais j’avais connu pire. Le restaurant était spectaculaire. Il avait bien choisi la table, un peu à l’écart, la vue était à couper le souffle. En face de moi, un couple mal assorti, comme on en rencontre beaucoup par ici. Une beauté russe d’une vingtaine d’année, mangeait face à son « oncle », le soir de la St Valentin, Monsieur bien mis, calvitie avérée, plus proche de la fin que du début.


Le repas fut parfait et je me laissais même tenter par une coupe ou deux. À l’arrivée du dessert, mon futur époux mit un genou à terre et me fit la demande, les larmes aux yeux. Je n’ai pas eu le temps de répondre. Un cri russe, les serveurs affolés couraient dans tous les sens. L’oncle chauve s’asphyxiait. Peu importe ce qu’il avait de coincé dans le gosier, le maître d’hôtel le secouait de droite à gauche très violemment en le tenant fermement par les côtes. Monsieur Calvitie cracha la chose, en plein milieu de la salle et en profita pour vider l’intégralité du repas à deux pas de notre table.


Je ne me souviens plus vraiment de ce qui a suivi. Le champagne. La morphine. Le choc. Un oui murmuré. Des dessous rouges pour un après qui n’eut finalement pas lieu. Un oui pour rétablir l’ordre des choses devant un pasteur quelques temps après.


Et finalement, « le resto du vendredi » pour en finir.

Si vous me suivez ou si vous avez acheté mon livre, vous connaissez ce resto. Cette histoire est vraie.


Véronique Lanonne

@2021

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