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Photo du rédacteurVéronique Lanonne

NOTRE DAME

Pierre,


Tes photos sont enfin arrivées, quel bonheur de vous voir, les enfants et toi, si heureux après la reconstruction de l’orphelinat. Bientôt 4 ans. Triste anniversaire. La terre a englouti bien plus que des maisons en bois. Mais à l’autre bout du monde peu s’en soucient. Je sais combien ta présence est importante pour eux et je n’ai pas le droit de dire que tu me manques. Toi au Népal moi à Québec, aimer parfois c’est renoncer à être ensemble.


Je n’ai pas choisi le toit du monde mais j’ai choisi, tout comme toi, une terre peu encline à recevoir la vie. Et pourtant j’y suis heureuse. Je t’avoue qu’en ce moment les mots m’oublient. Je reste des heures devant une page blanche sans qu’ils ne viennent. Je sais ce que tu dirais. Tant que mon cœur battra ils seront là. Mais pour l’instant ils se cachent. Comme le printemps.


Je n’ai pas entendu le chant des oiseaux depuis si longtemps ni eu le plaisir de voir une fleur s’épanouir. J’ai tant envie de m’asseoir sur un banc. Me laisser éblouir par le soleil sans être glacée par le vent. Le blanc me manquera mais pas tout de suite. Là, j’ai juste besoin du printemps et de la renaissance. De la vie sous le blanc.

Je me souviens de notre séjour à Saint Jean de Luz. Du soleil. De ta main dans la mienne. Des embruns iodés qui nous rafraichissaient. Et du fameux château de sable emportés par une vague. Plus que le château reste gravée en moi ta déception de voir tous tes efforts réduits à néant. C’est la vie qui compte. Pas les maisons en bois, en sable ou en pierre. Je dis ça à l’heure où Notre Dame se consume emportant avec elle un morceau de notre histoire. Une flèche tombe et le monde pleure. Oubliant que l’histoire c’est aujourd’hui et que ce sont les hommes pas les lieux qui la forge.

Toi plus que nul autre sait. On sauve des pierres et on oublie la vie. On préserve des lieux pour ne pas oublier qui nous sommes et on ravage notre terre. Je vais regarder tes photos à nouveau. Un orphelinat en bambou et des enfants qui sourient. Ça me fera tout oublier. Oublier que tu me manques. Oublier que les hommes s’égarent bien trop souvent. Oublier que l’hiver n’en finit pas et qui sait, retrouver la foi derrière le feu.

Je t’aime.

Catherine


Véronique Lanonne ©2019

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